Le soir de mâchoires de cochon grillées
La
mère s’active en cuisine pour sa soupe à la tomate. Le père dans la cour sous
le frangipanier installe la gente de pneu. C’est barbecue-africain. Au centre,
il installe le charbon, quelques petits bois. Quelques efficaces goutes de
benzine, un gratouillis d’allumette, il la lance enflammée, le feu prend et se mijote de braises incandescentes. La grille
est installée sur la gente. Et sur un coin de table, avec son poignard du
djebel, il va sur les joues du cochon faire quelques quadrillages :
permettre au grillé d’avoir plus de surface à son œuvre. Les joues à l’abattoir ne sont jamais dépecées de la mâchoire. Il
sale, poivre, épice, couvre de thym frais, de romarin, laurier. La braise est
« al dente », elle crépite. Par deux, têtes bêches sur le grill, elles
sont déposées.
La
maman à ce moment là, passe à la moulinette les tomates et le bouquet
fleuri ail, oignon, clous de girofle. Au
dernier moment elle râpera une gousse de manioque.
C’est
une chorégraphie qui se met en branle, le jour des mâchoires grillées. Même le
camion arachides en partance pour
la Mauritanie fait le décor avec
les sacs de guaneaux. Le caquetage des pintades : orchestre pas « en
fausse ». Elles vont, viennent en petites fleurs d’opéra noires et blanches.
Le contre point de l’affaire est la mission des filles. L’une ou l’autre. Ne jamais sauter un tour,
malgré les petites manipulations d’intimidation. Sur terre d’Afrique, la petite à l’œil du père, on ne peut la
menacer sans être tout de suite repérer. Il a observé le manège à leur arrivée
à Abidjan… Elle avait du en baver la Pompon. Sous haute surveillance les coups
de latte de l’aînée et la main leste de la mère.
La
mission : dans la salle de bain laquée bleu outremer soir sans lune,
prendre le pot de chambre familial, aller au fond du grand jardin et dans la
cabane le verser dans le trou. Attendre
1 minute pour entendre que de la cargaison est arrivée en son endroit.
L’autre dresse la table sous le frangipanier.
La
soupe à la tomate de chez nous, notre France dans l’assiette, notre Courçon
d’Aunis. Cette couleur a absorbée en opposition au blanc laiteux des fleurs du
frangipanier… La transparence des graines de manioque. Le goût si sucré des
tomates de Bobo Dioulasso. C’est un jour divin où tout se tait sauf les pintades
et la mère cesse ses guirlandes de râleries au père.
Après
chacun a ce morceau d’anatomie qui déborde de par et d’autre de son assiette,
l’odeur du grillé : alléchant velouté pour narines de paysannes. Même silence
sauf les minauderies gutturales de la chienne qui voudrait bien avoir sa
mâchoire. Ici c’est Bobo, c’est le présent. Les musulmans ne mangent pas de
cochon, les colons ne mangent pas ces abats. Nous les récupérons. Grâce à Papa
qui n’a pas oublié son ancien métier « boucher » et passe
régulièrement aux abattoirs rendre visite à ses anciens collègues –métier- apprendre d’autres mode de découpage.
Pas
de dessert, à l’unanimité Nous souhaitons rester avec le goût de grillé dans la
bouche.
Frankie Map’s Monde
Sous
la direction artistique
de Françoise Pain
de Françoise Pain
Droits
réservés
photo de jean bathiste le photographe au scooter
Trouver son livre n'est ce pas une joie ?
bonne lecture et à tout bientôt merci de vos billets commentaires sur les textes de Philippe Delherm.
Bien envie de goûter ces mâchoires de cochon grillées. Bises
RépondreSupprimeren ce temps pas de temps ...pour te lire ..mais tes portraits sont superbes! bises
RépondreSupprimerTu me fais saliver ! J'ai adoré le grill sur la gente jante...
RépondreSupprimerj'ai été devancer par Gine
RépondreSupprimeril y a comme un fumet qui me chatouille les narines après avoir lu
je sis ravie de vous avoir chatouillé les narines et je vous comprends car qu'est ce que s'était bon.
RépondreSupprimerIl nous faudra un jour nous rendre à un endroit, j'irai à l'abattoir du coin et d'autre prepareont les gentes et nous degusteront
Bisous