samedi 22 mai 2010

Ecriture et oralité



venez nous rejoindre en atelier d'écriture
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quelques citations du blog que je vous conseille de visiter
bon dimanche

Un arbre a besoin de deux choses : de substance sous terre et de beauté extérieure. Ce sont des créatures concrètes mais poussées par une force d’élégance. La beauté qui leur est nécessaire c’est du vent, de la lumière, des grillons, des fourmis et une visée d’étoiles vers lesquelles pointer la formule des branches.
Trois chevaux de Erri de Luca




Hélène Lanscotte

DANS LE BLOG CITE en dessous


Debout un lecteur lit à voix haute un texte. Assise dans le public, je le regarde, je l’écoute.



Les lignes s’étagent. Les lignes se dressent. La page du livre est architecture.

Architecture et non pas mur que la voix du lecteur édifie mais dans laquelle elle s’immisce, révélant là une courbe, ici un soubassement ; éclairant là un arc, ici une ligne claire. Architecture contemporaine ou classique, pour chacun ses cadences de jours et d’opacité, ses traits courbes ou hachés.

Les yeux du lecteur suivent, de mot à mot. Ses lèvres courent de son en son. Le lecteur a mordu dans les syllabes du premier mot de la première phrase, peut-être celle du livre, peut-être pas. Sa voix est portée, timbrée, l’air dans sa gorge vibre. Deuxième, troisième phrase… A mes oreilles parvient la musique, le rythme. A ma raison la syntaxe, l’articulation des mots. Quel noyau de sens élaborent ces phrases ? Quelles images se dessinent ? Quelle émotion subite surgit ? Je veux entendre, sentir, comprendre. Je veux tout cela. Je veux recevoir la beauté du texte qui m’est offert.

Et cela advient. Pour moi le texte est lu.

Un temps du moins. Car subitement je m’aperçois que je me suis éloignée. Quelques secondes, une minute peut-être. Une pensée m’a emportée, une impression vague m’a parcourue, engendrée par l’écoute. Ne suis-je pas, auditrice, dans la même liberté que lorsque lectrice silencieuse je découvre que mes yeux sur la page patinent tandis que mon attention divague, déroulant un rêve, un souvenir, une idée, un sentiment ? Et quand cette parenthèse se clôt, je retourne à ma lecture là où je l’avais laissée ou peut-être pas.

Cette lecture à haute voix a déclenché en moi le même envol. Mais lorsque mes oreilles de nouveau se rouvrent, elles n’ont en rien la possibilité d’entendre ce qu’elles n’ont pas écouté, la lecture a poursuivi son cheminement sans moi.

Est-ce problématique ? Oui, si l’on attache de l’importance au nœud de l’histoire. Non, si on se situe dans le même aléa que celui de la lecture intime ou encore si on appréhende ce moment comme la découverte d’un livre lu ensuite soi seul.

Me revoici donc en pleine conscience d’être dans le présent de l’écoute. Cependant la lecture s’est modifiée et je suis certaine que ce n’est pas mon absence qui est cause de ce déséquilibre soudain. L’architecture sonore et sensible du texte a disparu. Il n’y a plus qu’un fil de phrases s’échappant d’une bouche. Certes je perçois quelques pauses, quelques effets de rythme mais l’édifice n’est plus que lignes qui se suivent comme aspirées vers un siphon final.

L’édifice du texte s’est lissé, obturé : plus de saillies, plus d’arcades, plus de trouées, plus de balcons. Plus d’architecture.

Deux raisons possibles pour parvenir à ce même constat.

La première, le lecteur se fait lentement et sûrement dévorer par le texte. Et ce qu’il précipite dans cette dévoration, ce n’est malheureusement pas lui seul, mais lui et le texte.

Dès lors je n’entends plus le texte, je le « vois », je vois une litanie dans laquelle mélodie et rythme ont disparu.

Il est une croyance dans le pouvoir de la voix comme medium si puissant qu’il suffirait à rendre justesse et force à un texte. Or toute voix trahit, toute voix peut corrompre un texte, soit en ne lui donnant pas la voix de sa résonance, soit et c’est là le second cas, en dévorant le texte, c’est à dire en le tirant vers des exagérations, des exacerbations qui le défigurent.

Le lecteur est l’aiguille de la mesure. Il est le funambule de son interprétation. Un pas d’un côté et il se laisse engloutir. Un pas d’un autre et il engloutit le texte.

Si un texte doit ravir – aux deux sens du terme – le lecteur afin qu’à son tour ce dernier ravisse l’auditoire, il n’en demeure pas moins que le lecteur se doit d’être dans la vigilance du dompteur. Un dompteur prêt à tout instant à réagir contre une échappée, une rébellion du texte – les plus denses, les plus uniques étant les plus rebelles.

Un dompteur, ni docile, ni inconscient, un dompteur empoignant le texte, le soulevant de la page avec justesse.

Au lecteur à haute voix de lui donner ce à quoi il aspire : être dans sa tension d’histoire, être une architecture sonore.


découvrez ce blog si vous ne le connaissez pas

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