mardi 20 décembre 2011

dans l'arbre à voeux : le texte de Chantal S. de l'atelier d'écriture de l'Hajat

Sarah B



“Prenez tout mais laissez-moi l’extase...”

Chaque soir elle empreinte funambule le fil roux du chemin. Sarah B. teint diaphane joues rosées du vent caresse, yeux noirs sous des paupières voile soyeux, lèvres carminées, un châle coloré sur ses épaules, doux à porter. Il fait un peu froid au tournant de l’hiver, le vent aigu de l’océan siffle, brumisent les embruns.
Elle s’asseoit un instant au bord de la falaise vertige, contemple l’horizon; la boule gonflée du soleil rouge a crevé les nuages, bientôt évanouie aux confins du ciel nappé orangé.


Sarah poursuit le sentier, ventre embrasé, tête bourdonnante pensées accélérées de l’air iodé, pensées cadencées, à chaque pas résonnent en elle les forces de la terre et du ciel étoffe pourpre d’avant la nuit. Le vent s’engouffre sous son châle, désuet parachute, lui fait accélérer la marche. A travers le frémissement des feuilles de la haie, au mitan d’un champ cultivé apparait une masse sombre, un cerf râblé toutes ramures arborées, approche, la dévisage, familier, étrange vision, étonnements croisés, est-il possible? Son cœur chavire. Il est bien là cependant entre sillons et topiaires. Sarah marche sans se retourner, son pied heurte un galet blanc, elle court maintenant guette les lueurs apaisantes du village, contourne le lavoir aux fées du Ménné, sur le rebord un échassier migrateur, altier long bec cou grêle élancé : le héron cendré se désaltère
Sarah pénètre dans le bourg, elle guette nichée dans abbatiale la belle endormie, la vierge aux yeux baissés, paupières pigmentées de larmes de pluie.. qui semble lui susurrer : “ne crains pas, aie confiance!” Sarah s’enfonce dans les ruelles désertées, aperçoit les lumières tamisées du bar, Place du Leurrhé “Au Cercle des Menteurs” c’est écrit en lettres vivantes, le contourne puis revient, pousse la porte. Quelques habitués à l’intérieur, l’homme fantôme au fond de la salle assis tout la journée sans prononcer un mot, deux compères appuyés au zinc de bières en bières pas mal éméchés, un jeune homme à la cymbale joue une partition muette, Marien il s’appelle.Sarah le fréquente depuis le collège.


Derrière le bar crocheté au mur vétuste, un tableau représente mi-homme mi cheval un centaure offrant une jarre de vin à Dionysos. Le tenancier apothéose gastronome s’affaire, tartine foie gras sur canapés de pains d’épice ourlés piquetés de myrtille, concocte maints autres mets succulents pour une fête improvisée sirop d’orgeat. Il a chaud.


Marien lève les yeux, aperçoit Sarah, s’approche d’elle, effleure ses lèvres la joue le cou, lui réchauffe les mains la prend dans ses bras, lui parle des mots chuchotés, la conduit à la chambre numéro six à l’étage la chambre claire et blanche, fenêtre sur ciel.


Sur une commode en merisier une statuette africaine, petit gardien embusqué gourdins aux mains repliées-serré torse plaqué d’or, visage concentré, archange ténébreux ou démon? livres empilés, un masque vénitien cire rosacée ainsi fait qu’il semble vrai, de plumes rouges-sang surmonté, évoquant fascination répulsion frissons.


Silence. Temps suspendu en fond de gorge nouée.
Une musique ruisselle, cascade de notes jaillies de l’eau delà, dévale falaises et précipices, évocation de paysages, spasmes contreplongée, échappées d’un concerto de Schoenberg, le piano plaque accords et désaccords, les violons s’évadent, fuite ahurissante, cymbales fracassements, interjections, la musique s’affole urgence et évasion, le cerf revient en songe ou réalité pour la hanter ? Au cœur du souvenir, en lisière de la forêt échevelée, arcanes de la vie, ébats et plaintes au vent ...
“Vivre est si sensationnel qu’il reste peu de temps...”


Reine d’un soir, Sarah redescend lentement l’escalier étroit vers les cuisines en contre-bas, sur la pierre à évier, étagère de pommes granny alignées, en lettres gravées on lit Scheveningen, fluidités d’eau claire, Sarah se désaltère, c’est frais c’est bon, puis s’enfonce dans la nuit encrée de chine.
Elle avance dans le blanc de la lune, accélère, frissonne, vulnérabilité, châle désordonné.


La première fois.


-” Je t’attendais plus tôt Sarah, ferme la porte, le froid va nous geler! ”
Elle s’asseoit près de l’arbre à vœux tout près de l’âtre, joie ou tristesse, sur sa joue perle une larme dont elle seule a le secret.


Porteuse de rêve la nuit caresse les tuiles du toit, quelques gouttes de pluie d’avant le silence crépitent à la lucarne, le sommeil s’invite sous ses paupières closes.
de Chantal S.

Sous la direction de Frankie Pain de l'atelier des Ecritures de l'Hajat







Frankie a cueilli pour Chantal S. et vous, ses quelques associations d'images

comme ce n'est pas mon écrit, je n'ai pas voulu entailler le texte : il peut d'ailleurs grandement se suffire à lui même.

merci Chantal pour votre belle et délicieuCE participation à
L’Arbre à Vœux de l'année 2011

2 commentaires:

  1. I wish you and yours a lovely holiday seasons as well.
    wishing you joy, health, love each and every day.

    warmly,
    Elena

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  2. Félicitations c'est une belle participation.

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