et très belle fête du jour
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En savoir plus sur
(Extrait de Universalis 95) Le titre du recueil
dans lequel Reverdy réunit en 1949 les poèmes écrits
au long de plus de trente années (1913-1949), Main-d’œuvre, révèle le secret profond du poète et de
son originalité. Voici en effet un poète, au sens authentique et étymologique,
d’abord un manouvrier
du verbe. N’était-il pas issu d’une lignée d’artisans languedociens,
manouvriers de la pierre et du bois dans cette Montagne Noire où nature et
solitude se joignent en un accord à la fois pathétique et serein ? Un
autre recueil a pour titre Grande
Nature (1925). Deux pôles d’une poésie essentielle :
le verbe à travailler et à sculpter pour produire un univers de formes
symboliquement accordées aux mystères du monde et à ceux de la conscience ;
et la nature à contempler dans la solitude, à réinventer dans la contemplation
pour authentifier le rêve et consolider l’imaginaire ; en un mot,
obsession de l’accord entre l’art et la vie : « L’art pour
l’art ; la vie pour la vie, deux points morts. Il faut à chacun l’illusion
des buts et des raisons. L’art par et pour la vie, la vie pour et par
l’art. »
le bonheur des mots
Je n’attendais plus rien quand tout est revenu, la
fraîcheur des réponses, les anges du cortège, les ombres du passé, les ponts de
l’avenir, surtout la joie de
voir se tendre la distance. J’aurais toujours voulu aller plus loin, plus haut
et plus profond et me défaire du filet qui m’emprisonnait dans ses mailles.
Mais quoi, au bout de tous mes mouvements, le temps me ramenait toujours devant
la même porte. Sous les feuilles de la forêt, sous les gouttières de la ville,
dans les mirages du désert ou dans la campagne immobile, toujours cette porte
fermée – ce portrait d’homme au masque moulé sur la mort, l’impasse de toute
entreprise. C’est alors que s’est élevé le chant magique dans les méandres des
allées.
Les hommes parlent. Les hommes se sont mis à parler et le bonheur s’épanouit à l’aisselle de chaque feuille, au creux de chaque main pleine de dons et d’espérance folle. Si ces hommes parlent d’amour, sur la face du ciel on doit apercevoir des mouvements de traits qui ressemblent à un sourire.
Les chaînes sont tombées, tout est clair, tout est blanc – les nuits lourdes sont soulevées de souffles embaumés, balayées par d’immenses vagues de lumières.
L’avenir est plus près, plus souple, plus tentant.
Et, sur le boulevard qui le lie au présent, un long, un lourd collier de cœurs ardents comme ces fruits de peur qui balisent la nuit à la cime des lampadaires.
Les hommes parlent. Les hommes se sont mis à parler et le bonheur s’épanouit à l’aisselle de chaque feuille, au creux de chaque main pleine de dons et d’espérance folle. Si ces hommes parlent d’amour, sur la face du ciel on doit apercevoir des mouvements de traits qui ressemblent à un sourire.
Les chaînes sont tombées, tout est clair, tout est blanc – les nuits lourdes sont soulevées de souffles embaumés, balayées par d’immenses vagues de lumières.
L’avenir est plus près, plus souple, plus tentant.
Et, sur le boulevard qui le lie au présent, un long, un lourd collier de cœurs ardents comme ces fruits de peur qui balisent la nuit à la cime des lampadaires.
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la tête pleine de beauté
Dans l’abîme doré, rouge, glacé, doré, l’abîme où gîte la
douleur, les tourbillons roulants entraînent les bouillons de mon sang dans les
vases, dans les retours de flammes de mon tronc. La tristesse moirée
s’engloutit dans les crevasses tendres du coeur. Il y a des accidents obscurs
et compliqués, impossibles à dire. Et il y a pourtant l’esprit de l’ordre,
l’esprit régulier, l’esprit commun à tous les désespoirs qui interroge. Ô toi
qui traînes sur la vie, entre les buissons fleuris et pleins d’épines de la
vie, parmi les feuilles mortes, les reliefs de triomphes, les appels sans
secours, les balayures mordorées, la poudre sèche des espoirs, les braises
noircies de la gloire, et les coups de révolte, toi, qui ne voudrais plus
désormais aboutir nulle part. Toi, source intarissable de sang. Toi, désastre
intense de lueurs qu’aucun jet de source, qu’aucun glacier rafraîchissant ne
tentera jamais d’éteindre de sa sève. Toi, lumière. Toi, sinuosité de l’amour
enseveli qui se dérobe. Toi, parure des ciels cloués sur les poutres de
l’infini. Plafond des idées contradictoires. Vertigineuse pesée des forces
ennemies. Chemins mêlés dans le fracas des chevelures. Toi, douceur et
haine—horizon ébréché, ligne pure de l’indifférence et de l’oubli. Toi, ce
matin, tout seul dans l’ordre, le calme et la révolution universelle. Toi, clou
de diamant. Toi, pureté, pivot éblouissant du flux et du reflux de ma pensée
dans les lignes du monde.
oeuvre complète de Pierre reverdy
Une très belle découverte!
RépondreSupprimerJ'ai beaucoup aimé et je retiens: "Il faut à chacun l’illusion des buts et des raisons. L’art par et pour la vie, la vie pour et par l’art."
Merci pour le partage ma belle Frankie!
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Gros BISOUS et BON dimanche****
Le poète est un traducteur, il traduit en mots nos pensées informes qui prennent consistances à sa lecture.
RépondreSupprimerMerci Frankie de nous faire partager de tels écrits
je t'embrasse
Le poète, comme le chaman est un passeur entre des mondes.
RépondreSupprimerMoi, c'est par Anaïs Nin que je l'avais découvert.
RépondreSupprimerMerci Frankie.
Une belle découverte pour moi, merci Frankie et bon début de semaine !!
RépondreSupprimerBisous, Laure