mercredi 4 août 2010

La dernière demeureRUBRIQUE LDE LA MAISON


La dernière demeure

La toute première fois que j’ai vu un feu follet, c’était dans le petit cimetière du village de mon enfance.

La frayeur passée, j’ai regardé cette lueur qui dansait dans le noir absolu.

Une couleur verte légèrement fluorescente seule au milieu des tombes.

Cela faisait comme la danse rougeoyante des braises lorsque le feu s’apaise, fatigué d’avoir trop flambé.

Je me suis imaginée que peut-être une âme à qui la vie manquait revenait quelques instants pour danser sur sa tombe. Comme une pirouette.

J’avais treize ans et étais assez rationnelle. Le lendemain je me suis rendue au cimetière, vers l’endroit d’où était apparu la lumière.

Il n’y avait que de vieille tombes anciennes et aucune trace de ma vision nocturne.

Je me souviens m’être assise sur une vieille souche le long du mur.

J’ai toujours aimé les cimetières, surtout ceux des campagnes, ils sont moins fiers que ceux des villes. La mort y est plus modeste sans doute, et plus pauvre aussi.

C’est là qu’au printemps je trouvais les plus odorantes et les plus belles violettes (ce n’était pas bien loin de Toulouse) et que les lendemains de pluie nous trouvions les plus gros escargots pour un escargolade de rires.

Dans ces lieux de dernières demeures on trouve une paix et une sérénité sans pareil. J’y ai flâné, écris et cueillis des fleurs sauvages. Je m’y sens chez moi.

On y trouve même les strates sociales de notre société humaine : certains, bouffis d’orgueil, se sont fait bâtir des mini-cathédrales, d’autres se sont contentés d’une sobre pierre tombale et en bas de l’échelle ceux qui n’ont pu s’offrir que le lopin de terre où éclosent les fleurs des graines apportées par le vent bien des années plus tard…

Pour ma dernière demeure, je n’ai qu’un souhait : avoir une jolie vue.

Je suis sûre que serai un joli feu follet, que je viendrai parfois danser et admirer encore ma Terre, "ronde et bleue comme une orange" disait le poète !
texte proposé par SOPHIE LA BRODEUSE DE MOTS ECRIT PAR ELLE

1 commentaire:

  1. sophie brodeuse des mots ce texte est magestueux,
    le partage de nos mails aujourd'hui me permet encore plus de le dire
    j'ai trouvé que cet arbre rouge représentée bien votre peite flamme et la modo de smetana par un orchestre tchèque convenait à l'âme russe que vous porter dans vos gènes et votre cœur
    je vous embrasse avec la délicatesse d'une duvet de cygne quand il a découvert qu'il n'était pas le petit canard mais de la famille des grands oiseaux

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