Akbar et l’amoureuse
Akbar le Conquérant était un homme pieux. Il avait chevauché jusqu’au fin fond des Indes, conquis d’innombrables cités, asservi des peuples sauvages et d’autres aux sandales brodées, aux robes de safran, aux musiques profondes. Courber la tête, lui ? Jamais, sauf tous les jours, fidèlement, devant Allah et son prophète.
Donc il advint que ce grand homme, un matin d’été sans combat, s’éloigna seul du campement, s’en fut jusqu’a un bosquet proche, parmi les chants des rossignols et les traits de soleil mouvants, et là, dans l’herbe, déposa son précieux tapis de prière. Il se prosterna, puis s’assit, croisa les doigts sous le nombril et les yeux clos il écouta l’infini silence de Dieu. Or, comme il méditait ainsi, un appel soudain le troubla. Il entrouvrit un œil, aperçut une fille qui courait çà et là parmi les buissons bas. Elle appela encore, inquiète, tournant et retournant la tête. Elle semblait prise corps et âme par le désir de retrouver quelqu’un qui manquait à sa vie. En vérité elle l’était tant qu’elle ne vit pas le méditant. Sa robe effleura son épaule, son pied bouscula son tapis. Elle disparut parmi les arbres. La paupière d’Akbar frémit. Son ciel du dedans se couvrit d’éclairs et de nuées d’o-rage. Il se raidit, il inspira, expira un souffle tremblant, tenta de retrouver son calme. Il ne put. Il se redressa, roula son tapis et s’en fut.
Il entendit alors la fille. Elle s’en revenait, elle riait. A son bras était un jeune homme. Elle lui gazouillait son souci, sa joie de le revoir près d’elle. Le Conquérant lui vint devant.
- Holà, femelle, lui dit-il, sais-tu bien qu’aucun être au monde n’a jamais osé déranger Akbar dans son recueillement? Tu l’as fait. Veux-tu donc mourir ?
Elle répondit, toute contrite, les mains unies sous le menton :
- Aie pitié de moi, majesté. J’étais si inquiète, à vrai dire, et si absorbée à chercher ce beau vivant, mon bien-aimé (il tardait tant à me rejoindre !) que je ne pouvais voir que lui. Mais toi, ô prince des croyants, si intimement joint à Dieu dans ton oubli de ce bas monde, comment as-tu pu remarquer qu’une fille passait par là ?
Akbar grogna, puis s’inclina. Il se remit à sa prière. Jusqu’au soir il s’y oublia.
(Henri Gougaud, Le livre des chemins)
vania Brûle pour sa belle soeur
Textes du jour de la blog-woman, phrases : colonne vertébrale, contes, légendes, mots d'humeurs, d'amour, lettres à la mer, recherche de connivence, complicité, ses dessins, ...la jazzeuse des grands chemins et sentes, écrivaine nomade des murmures de la vie intérieure et des happening minimalistes nés au hasard d'un banc public dans un parc aromatique , un abri bus , un train , un marché, les pas perdus d'un aérogare tous les lieux insolites pour une rencontre.
Marilyn, Lyz Taylor auraient non seulement interrompu la méditation mais rendu fous tous les saints!
RépondreSupprimerQu'est-ce que je vois ? Marilyne entrain de lire l'Ulysse de Joyce ! Ça n'est pas banal !
RépondreSupprimerQuoique... Vous savez ce que lit Pamela Anderson ? La République de Platon !!!
Si vous ne me croyez pas allez donc voir ici :
http://citationdujour.blogspot.fr/2009/03/citation-du-4-mars-2009.html
Akbar n'était pas bien consentrer. Bonne fin de semaine.
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