Les marronniers qui nous ombrageaient étaient
en fleur ; l'air était surchargé de leurs parfums persuasifs et du pollen
qui voltigeait autour de nous. Dans les taches de soleil on aurait pu
facilement faire cuire sur une pierre quantité de ces brioches aux raisins de
Corinthe que Périplépoménos vend dans sa baraque près du pont. Mais elle
n'avait rien à croquer si ce n'est le bras que j'avais passé autour d'elle et
qu'elle mordillait malicieusement quand je la serrais un peu trop fort. Il y a
une semaine elle était malade, quatre jours allongée sur son lit de repos, mais
aujourd'hui libérée, leste, elle bravait le danger. C'est alors qu'elle est le
plus prenante.
Ulysse (1922),
Tout droit vers la mer morte leurs pas les
mènent boire, inassouvis et en d'horribles goulées, le flot dormant, salé,
inépuisable. Et le prodige équestre de nouveau croît et se hausse dans le
désert des cieux à la taille même des cieux jusqu'à recouvrir, démesuré, la
maison de la Vierge. Et
voici que, prodige de métempsychose, c'est elle, l'épouse éternelle, avant-courrière
de l'étoile du matin, l'épouse, toujours vierge. C'est elle, Martha, douceur
perdue, Millicent, la jeune, la très chère, la radieuse. Comme elle est à
présent sereine à son lever, reine au milieu des Pléiades, à l'avant-dernière
heure antélucienne, chaussée de sandales d'or pur, coiffée d'un voile de
machinchose fils de la vierge ! Il flotte, il coule autour de sa chair
stellaire et ondoie et ruisselle d'émeraude, de saphir, de mauve et
d'héliotrope, suspendu dans des courants glacés de vent interstellaire,
sinuant, se lovant, tournant nos têtes, tordant dans le ciel de mystérieux
caractères au point qu'après des myriades de métamorphoses il flamboie, Alpha,
rubis, signe triangulé sur le front du Taureau.
Ulysse (1922),
Les voix se marient et se fondent en un silence
nébuleux : un silence, qui est l'infini de l'espace ; et vite, en
silence, l'âme aspirée plane au-dessus de régions de cycles des cycles de
générations qui furent. Une région où le gris crépuscule descend toujours sans jamais
tomber sur de vastes pâturages vert amande, versant sa cendre, éparpillant sa
perpétuelle rosée d'étoiles. Elle suit sa mère à pas empruntés, une jument qui
guide sa pouliche. Fantômes crépusculaires cependant pétris d'une grâce
prophétique, svelte, croupe en amphore, col souple et tendineux, douce tête
craintive. Ils s'évanouissent, tristes fantômes : plus rien. Agendath est
une terre inculte, la demeure de l'orfraie et du myope upupa. Netaïm la
splendide n'est plus. Et sur la route des nuées ils s'en viennent, tonnerre
grondant de la rébellion, les fantômes des bêtes. Houhou ! Héla !
Houhou ! Parallaxe piaffe par-derrière et les aiguillonne, les éclairs
lancinants de son front sont des scorpions. L'élan et le yak, les taureaux de
Bashan et de Babylone, le mammouth et le mastodonte en rangs serrés s'avancent
vers la mer affaissée, Lacus Mortis. Troupe zodiacale de mauvais augure
et qui crie vengeance ! Ils gémissent en foulant les nuages, cornes et
capricornes, trompes et défenses, crinières léonines, andouillers géants,
mufles et groins, ceux qui rampent, rongent, ruminent, et les pachydermes,
multitude mouvante et mugissante, meurtriers du soleil.
Ulysse (1922),
La blancheur de cire du visage le
spiritualisait par sa pureté d'ivoire tandis que le bouton de rose de sa
bouche, d'un dessin digne de l'antique, rappelait l'arc même l'Eros. Ses mains
étaient de l'albâtre le plus finement veiné, ses doigts effilés et, bien que
leur blancheur pût devoir quelque chose au jus de citron et à la reine des
crèmes, il n'était pas exact qu'elle eût l'habitude de porter des gants de
chevreau au lit ni qu'elle prît des bains de pieds au lait.
Ulysse (1922),
ami de Joyce, comme Joyce en son temps Beckett l'écrivain irlandais
Ma femme et votre femme. Une chatte miaularde.
Comme de la soie qu'on déchire. Et quand elle parle un clapet de moulin. Elles
n'arrivent pas à faire des intervalles aussi grands que les hommes. Un trou
aussi dans leur voix. Emplissez-moi. Je suis chaude, sombre, ouverte. Molly
dans le quis est homo: Mercadante.
Ulysse (1922),
Joyce et Philippe Soupault
James Joyce (James Augustine Aloysius Joyce, 2 février 1882 à Dublin - 13 janvier 1941 à Zurich) est un romancier et poète irlandais expatrié, considéré comme l'un des écrivains les plus influents du XXe siècle1. Ses œuvres majeures sont un recueil de nouvelles, intitulé Les Gens de Dublin (1914), et des romans tels que Dedalus (1916), Ulysse (1922), et Finnegans Wake (1939).
Bien qu'il ait passé la majeure partie de sa vie en dehors de son pays natal, l'expérience irlandaise de Joyce est essentielle dans ses écrits et est la base de la plupart de ses œuvres. Son univers fictionnel est ancré à Dublin et reflète sa vie de famille, les événements, les amis (et les ennemis) des jours d'école et de collège. Ainsi, il est devenu à la fois le plus cosmopolite et le plus local des grands écrivains irlandais2.
Son œuvre est marquée par sa maîtrise de la langue et l'utilisation de nouvelles formes littéraires, associées à la création de personnages qui, comme Leopold Bloom et Molly Bloom (Ulysse), constituent des individualités d'une profonde humanité3.
Lisez Ulysse !
'lol)
combien d'années ai je mis pour l'ouvrir ?
un jeune auteure vous fait l'éloge de la lecture de james Joyce voici son blog
Pierre Ancery
beau mercredi
je suis aphone alors je fais parler les phrases des auteurs frankie
Pour moi aussi, Frankie, le projet de lire Joyce dure depuis trop longtemps. Peut-être trop sollicitée par les nouveautés, si souvent décevantes pourtant !
RépondreSupprimerBonne journée.
Belle écriture, c'est vrai... mais question personnalité, je suis assez dubitative! En tout cas, culture ou non, j'ai renoncé à le lire!
RépondreSupprimerIL a écrit de belles choses mais sa vie personnel est décevante.
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